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L’impact du mouvement inclusif sur le prêt-à-porter

By on 28/06/2024

Avec l’émergence des réseaux sociaux, les canons de beauté ont radicalement changé en donnant une nouvelle visibilité à une multitude de personnalités. Ce phénomène mondial a immédiatement impacté le milieu de la mode qui a dû pour la première fois, s’adapter à la rue et non plus dicter ses lois.

 

Entre le non-genre et l’arrivée de mannequins hors norme sur les podiums, les marques ont réagi très rapidement à cette nouvelle demande de mode inclusive permettant à tout un chacun de porter ce qu’il désire, sans limites de poids ou de genre.

Ainsi, Jean Paul Gaultier, pionnier dans ce domaine avec l’utilisation pour ses shows ou ses campagnes de mannequins de toutes tailles et de garçons en jupes, s’est vu talonné par des nouveaux labels ouvertement décidés à faire tomber les barrières d’une mode pour un type de femme ou d’homme.

C’est ainsi que lors du 33e Festival International de Mode de Hyères, la belge Ester Manas se fait repérer avec sa collection « Big Again », destinée à toutes les femmes, du 34 au 50. Confrontée elle-même à un problème de taille, elle imagine dans son atelier un prêt-à-porter fabriqué à base de matières spéciales et naturelles et doté de jeux de serrages, de coupes, de boutonnages, de ceintures ou de drapés pouvant ainsi s’adapter à toutes les morphologies. Parce que chaque corps est unique, elle imagine également des astuces pour les carrures, les différentes longueurs de bras ou de jambes avec des systèmes coulissants ou à boutonnière.

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ester_manas_pap_fw_2024-25_courtesy_ester_manas Ester Manas Automne-Hiver 2024-25

 

Dans ce même esprit de mode radicalement ouverte sur un nouveau monde sans notion de genre, la marque espagnole Palomo Spain a fait son apparition en 2015. Créée par Alejandro Gómez Palomo, la marque puise sa source dans la couture féminine et le prêt-à-porter masculin pour habiller les deux sexes. Dès 2016, il est présenté comme l’étoile montante de la mode espagnole et son succès prend une ampleur internationale lorsque Beyonce choisit une de ses pièces pour présenter ses jumeaux au monde entier. Cette photo reste aujourd’hui la seconde publication d’Instagram la plus likée. Il est ensuite invité par le Council of Fashion of America à présenter sa collection à la New York Fashion Week. Après un premier défilé à Paris, il devient officiellement membre du calendrier officiel masculin de la Fédération de la Haute Couture et de la Mode en 2018. Palomo Spain fait aujourd’hui partie de marques les plus engagées dans la mode non genrée.

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palomo_spain_ss_2024_courtesy_palomo_spain Palomo Spain printemps-été 2024

 

La France n’est pas en reste avec la nouvelle génération de designers qui propose un prêt-à-porter non binaire. Parmi les chefs de file, on retrouve Jeanne Friot qui propose une mode durable et genderless avec des séries limitées afin de conservant l’unicité de chacun.

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jeanne_friot_ss_2024_final_courtesy_jeanne_friot Jeanne Friot Printemps-éte 2024

Valette studio propose de son côté une mode masculine revisitée afin de plaire aux garçons comme aux filles. À la fois sophistiqué et nonchalant son style puise à la fois dans l’excellence du tailoring et du sportswear qu’il rehausse de tissus savamment choisis sans jamais se poser la question du genre qui la portera.

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valette_studio_loo4_ss_2024_courtesy_valette_studio Valette Studio printemps-été 2024

 

Si dans l’ensemble des grandes marques de luxe ont adapté cette nouvelle façon de concevoir la mode dans leurs collections, d’autres l’avaient anticipée depuis de longues années, en proposant une mode pour toutes sans limites de taille. C’est le cas du vépéciste Afibel qui fête cette année ses 70 ans. Jusqu’aujourd’hui plutôt catalogué comme une marque réservée à un public plus âgé, le spécialiste des grandes tailles opte pour une nouvelle communication ouverte à toutes les femmes qui aiment la mode.

Pour cette occasion, Afibel imagine une capsule été inédite aux imprimés exclusifs, entièrement designés en France, allant du 36 au 64.

Photographiée sur Chloé Perrin, alias Miss Curvy 2023, cette collection a pour ambition de donner le sourire à toutes les femmes, quelle que soit leur taille en s’assumant pleinement.

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afibel_robe_eclore_courtesy_afibel Afibel été 2024

 

De cette envie d’habiller toutes les femmes, en respectant la morphologie de chacune, Angelique Leroy et Mathilde Pichois imaginent Mieg, une marque spécialisée dans le trench. Pièce phare de la garde-robe qui peut se transmettre de génération en génération, les deux amies souhaitent offrir une expérience digne des grandes maisons en proposant un service sur-mesure grâce à la personnalisation. Les clientes peuvent ainsi choisir le motif de la doublure, le type de boutons et la longueur du manteau.

En plus d’un soin méticuleux à répondre à chaque type de corps, les deux créatrices ont opté pour une fabrication française, en petites séries pour une production raisonnée.

Face au succès des trenchs, la marque développe depuis peu une ligne de blazers, de t-shirt et de foulards et se verra enrichie de pièces masculines d’ici la fin de l’année.

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Face à cette nouvelle façon de concevoir la mode, c’est toute l’industrie de la mode qui a dû revoir ses concepts, à l’image de Cofrad, la société française spécialisée dans la conception et la fabrication de mannequins de vitrines depuis 1976. Monsieur Christophe Israël, PDG du groupe, nous en dit un peu plus sur ce sujet.

F-S : En tant que grand spécialiste de la création de mannequins de vitrines, l’arrivée de la mode inclusive at-elle eu un réel impact sur vos créations ?

Christophe Israël : Absolument, l’arrivée de la mode inclusive a eu un impact significatif sur nos créations. Depuis plus de 20 ans, nous avons anticipé cette tendance en développant des mannequins de grandes tailles allant du 42 au 60. En 2016, nous avons été les premiers à lancer une collection genderless, reflétant notre engagement envers l’inclusivité. Cette évolution nous a poussés à être toujours plus innovants et à diversifier nos modèles pour répondre à une demande croissante de représentations plus variées et authentiques.

 

F-S : jusqu’à présent quelle était la taille standard pour les mannequins ? Quel panel de taille proposez-vous aujourd’hui ?

Christophe Israël:  Traditionnellement, la taille standard pour les mannequins était autour du 36-38. Aujourd’hui, nous proposons un panel de tailles beaucoup plus large, allant du 36 au 60, pour mieux représenter la diversité des morphologies et répondre aux besoins de tous nos clients.

 

F-S : En peu de temps la mode inclusive s’est répandue dans les magazines et sur les réseaux sociaux. Les magasins sont-ils réellement sensibles à ce phénomène et la demande de mannequins de vitrine grande taille a-t-elle vraiment augmenté ?

Christophe Israël : Oui, les magasins sont de plus en plus sensibles à ce phénomène. La demande de mannequins de grande taille a considérablement augmenté ces dernières années, reflet d’une prise de conscience et d’une volonté d’inclusion plus marquée dans le secteur de la mode. Les consommateurs réclament des représentations plus réalistes afin de mieux s’identifier aux produits présentés, et les marques répondent à cette demande.

 

F-S : La mode inclusive ne se limite pas uniquement à la question de poids, elle englobe également celle du genre. Quelle est votre réponse à cette demande qui implique des modèles non binaires en matière de mannequin ?

Christophe Israël : En réponse à cette demande, nous avons été les premiers à développer une collection genderless dès 2016. Nos mannequins non binaires sont conçus pour refléter une esthétique inclusive, en rupture avec les normes de genre traditionnelles. Cette collection vise à offrir des options plus représentatives pour tous les genres, et nous continuons à innover pour répondre à cette exigence croissante.

cofrad_mannequin_non_binaire

F-S : Qui dit inclusivité, dit également mode pour tout le monde sans notion de couleur de peau. Les mannequins de couleurs ne sont pas une nouveauté, mais portez-vous une attention particulière à répondre à toutes les carnations en proposant différentes de couleurs de « nude » pour mieux répondre à toutes les différences de pigmentation ?

Christophe Israël : Absolument, nous portons une attention particulière à ce que nos mannequins reflètent la diversité des carnations. Nous proposons une gamme variée de teintes de « nude » pour répondre aux différentes nuances de peau, nous avons été la première marque à introduire des métissages de couleurs mais aussi de visages, Notre objectif est de garantir que chaque mannequin puisse représenter fidèlement la diversité de nos clients.

 

F-S : Très présent en France, ce phénomène est-il international ?

Christophe Israël : Oui, le phénomène de la mode inclusive est international, c’est une tendance qui a commencé aux USA, aujourd’hui, nous observons une demande croissante pour des mannequins inclusifs non seulement en France, mais aussi sur les marchés mondiaux. Cette tendance est portée par une prise de conscience globale de la nécessité d’inclure toutes les morphologies, genres et couleurs de peau dans les représentations de la mode.

 

F-S : Vous suivez l’évolution de la mode et de la morphologie pour répondre à la demande de vos clients, comment voyez-vous cette révolution inclusive dans le temps ? Un phénomène de mode ou bien une situation qui va s’installer petit à petit pour devenir une nouvelle norme ?

Christophe Israël : Nous croyons que l’inclusivité n’est pas un simple phénomène de mode, mais une évolution durable qui est en train de devenir la nouvelle norme. La demande pour des représentations plus diversifiées et authentiques ne fait que croître, et nous sommes convaincus que cette tendance va continuer à s’installer et à se renforcer dans le temps. Nous restons engagés à suivre cette évolution et à développer toujours plus de produits allant vers l’inclusivité.

 

Frédéric Blanc

About Fred

Frédéric Blanc, styliste photo, attaché de presse et fashion éditor de Fashion-spider, le magazine spécialisé mode et beauté, fait partie des figures incontournables de Paris.

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