Paris Fashion Week 2015-16 : les coups du cœur du Spider

By on 16/03/2015

La Paris Fashion Week Automne-Hiver 2015-16 vient de fermer ses portes avec 93 défilés officiels, une quarantaine de présentations et une bonne dizaine de shows off. Neuf jours extrêmement bien remplis qui ont permis aux designers français et internationaux de présenter leur mode pour la saison hivernale à venir. Même si nous avons assisté à un bon cru, il manque, en général, une absence de création dans la plupart des maisons, comme le souligne dans un manifeste la grande tendanceuse, Li Edelkoort, la mode devient de plus en plus standardisée par un abus des cahiers de tendances qui finissent par uniformiser les collections et éliminer la création. Les grands décisionnaires imposent des collections commerciales où les accessoires deviennent plus importants que les vêtements eux- mêmes et organisent des shows coûteux pour en mettre plein la vue, mais au final pour peu de propositions vraiment intéressantes.

Heureusement ,certains continuent d’innover ou tout simplement adapter à notre quotidien et la saison.

Le plus gros coup de cœur de Fashion-spider revient cette semaine à Anrealage qui récidive pour sa seconde présentation à Paris avec son thème fétiche : la photochromie. Décor noir, mannequins entièrement maquillés et coiffés de noir arborant des tenues noires ou noires et blanches en trompe l’oeil, un brin rétro dans leurs formes, mais modernisées par les matières et les techniques de pointe permettant l’apparition de couleurs ou de motifs de couleur lorsqu’ils sont soumis à la lumière UV.

Un réel plaisir de découvrir un travail parfaitement maîtrisé par le japonais Kuhuniko Marinaga, avec de vrais vêtements portables, modernes, techniques et chics.

ANREALAGE_AH_2015-16

Christine Phung, petite chouchoute de Fashion-spider, conserve sa place une fois encore avec sa mode 100% portable mais loin des conventions classiques. Baptisées « Glitchologie » ses propositions sont inspirées par le numérique. Entre sportswear et tailleur, elle propose un vestiaire urbain féminin empreint de modernité par l’utilisation de nouvelles matières comme le tweed métallique ou la laine thermocollée. Adepte de la photographie et de la peinture, elle a conçu ses imprimés à partir d’un cliché pris par un appareil photo cassé. A travers cet effet, elle a souhaité démontrer que le numérique possède également ses failles. Une mention particulière pour ses plissés donnant un style couture à son prêt-à-porter.

Christine_Phung_AH_2015-16_©_Etienne_Tordoir

Andrew Gn a présenté des manteaux et de vestes pour un hiver plutôt froid, mais qui donnent immédiatement envie de faire un bond dans le temps pour les enfiler. Parés de renard ou d’agneau de Mongolie pour le jour, brodés pour le soir ils sont tous une invitation à l’élégance et au confort. Les ensembles agrémentés de franges apportent une légèreté et un côté hispanique qui contrastent avec les chaudes matières d’hiver.

Andrew_GN_AH-2015-16

Barbara Bui réussit sa mission, une saison de plus, d’apporter une note rock dans la garde robe de sa clientèle qui aime le luxe chic non classique. Cuir noir, python marron et fourrure sont bien évidemment à l’honneur et se mixent aux lainages et aux mousselines dans un parfait accord. Elle réinvente la doudoune en vinyle et la jupe en cuir longue qui seront à coup sûr un des hits de l’hiver.

Barbara_Bui_AH-2015-16

Masha Ma qui, depuis 2012, a préféré délaisser les podiums de Londres pour ceux de Paris nous avait habitué à des collections toujours surprenantes, originales, mais souvent difficilement portables. Fidèle à sa logique, elle nous étonne une fois encore avec une très jolie collection complètement portable. Elle s’est inspirée du travail de l’architecte I.M.PEI, concepteur de la Pyramide du Louvre en utilisant ses lignes strictes et géométriques qu’elle intègre dans ses imprimés et ses découpes. Elle n’hésite pas à mixer les matières pour des effets ultra modernes dans des tons chauds.

MASHA _MA_AH-2015-16

Rahul Mishra, que l’on a découvert la saison dernière à Paris, est revenu d’Inde pour nous faire découvrir sa mode à mi chemin entre deux univers. Des coupes de plus en plus adaptées à notre civilisation pour des femmes élégantes, modernes et actives, mixées à des broderies traditionnelles faites main. Sa collection intitulée le « Village » est brodée de motifs réalisés selon des techniques indiennes ancestrales, ils sont hommage au village où il a grandi. Ils illustrent l’osmose entre l’homme et la nature afin de nous faire comprendre l’importance d’une mode différente où le prêt-à-porter devient œuvre d’art par l’apport d’un savoir-faire manuel sachant s’adapter au reste du monde. Les propositions de sweats sont particulièrement réussies et s’adaptent à merveille à un style streetwear de luxe.

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AF Vandevorst, qui avait déjà retenu mon attention pour l’été 2015 , récidive avec des propositions hyper créatives dans une palette de couleurs allant du gris au noir renforçant ainsi un style affirmé. Toujours dans la recherche du mouvement, on retrouve des formes où les tissus semblent flotter autour du corps. Une idée de protection vestimentaire se dégage également des pièces volumineuses ou bien de celles composées de fourrure ou de motifs rappelant la camouflage. Une chose est certaine : ici la mode se veut différente, créative et loin des tendances commerciales.

A.F.Vandevorst_AH_2015-16

Tsumori Chisato est l’impératrice de la mode ludique. Elle s’inspire des super héros pour une héroïne de tous les jours avec des propositions tout à fait portables, mais empreintes d’humour et de dérision. Très inspirés des années 60, les coupes sont en phase avec les imprimés des Comics et la créatrice japonaise n’hésite pas à se mettre également en scène dans sa bande dessinée imaginaire. Les ensembles du soir en paillettes s’accordent à merveille à ce thème jeune et coloré et le réticule fusée ne devra pas être laissé sans surveillance sous peine de le voir disparaître tellement il fera des envieuses !

Tsumori_Chisato_AH_2015-16

Manih Arora n’aime pas non plus la morosité et ce n’est pas ici que l’on va trouver un total look noir ou une tenue sobre ! Il imagine des guerrières ultra colorées et parées de bijoux ethniques, qui semblent déclarer la guerre à la mode conventionnelle de la rue où la fantaisie fait cruellement défaut. Bien évidemment, Manish exagère ici ses propositions, mais en « décortiquant » ses looks, on retrouve énormément de pièces complètement portables une fois dépareillées avec une identité forte.

Manish_Arora_AH-2015-16

Si certaines maisons comme Paco Rabanne ou Thierry Mugler ont perdu tout intérêt et sont dénuées de personnalité suite aux mauvais choix des dirigeants pour leurs directeurs artistiques, il en est d’autre comme Emanuel Ungaro qui ont su faire le bon. En effet, depuis l’arrivée de Fausto Puglisi, la maison semble avoir retrouvé son énergie, son dynamisme et son élégance hypra féminine. Les clins d’oeils au créateur de la maison sont nombreux avec un panel de toutes les créations maison allant des tailleurs pantalon stricts aux robes fluides en passant par les mini jupes hyper sexy et les plissés. Même si la maison est connue pour ses mélanges de couleurs, Fausto a décidé de les retirer pour se concentrer sur le noir et blanc sans tomber dans l’ennui. Il joue avec les pois, les lignes géométriques, les contrastes du bicolore et cela fonctionne à merveille.

Emanuel_Ungaro_AH_2015-16

Frédéric Blanc

About Fred

Frédéric Blanc, styliste photo, attaché de presse et fashion éditor de Fashion-spider, le magazine spécialisé mode et beauté, fait partie des figures incontournables de Paris.

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